Pour
mieux lire cet ouvrage, il faut probablement remettre en son temps et
son époque ce que l'on appelle le féminisme de Christine de Pizan, et ne
pas réduire son œuvre à cette seule vision anachronique.
Cela fait, on appréciera le modernisme et le courage de ses écrits qui
défendent les femmes, notamment en n'hésitant pas à entamer la critique
de grands auteurs : Ovide, Cicéron, Jean de Meung (voir ses "Épîtres sur
le Roman de la Rose")..., ce qui à son époque et dans sa position ne
manquait pas d'audace.
Christine est donc l'élue, appelée par la Raison, la Justice et la
Droiture à édifier, dans le Champ des Lettres, la Cité des Dames, ce
"royaume de féminie" dont on découvre qu'il est le livre lui-même.
La tâche de la femme de lettres consistera donc à mettre en avant, par
l'écriture et son art de la narration, toutes les femmes de l'histoire
ayant montré leur grande valeur : de Penthésilée à Artémise, de Bérénice
à Clélie, de Claudine à Pauline, le catalogue est grandiose et permet à
Christine de développer son grand art d'autrice cultivée et imaginative
pour nous raconter un grand nombre de petites histoires édifiantes et
instructives et rédiger des portraits saisissants, en citant fréquemment
le Décameron de Boccace et les Métamorphoses d'Ovide.
Le lecteur d'aujourd'hui lit tout cela avec étonnement et admiration.
"Qu'ils se taisent donc ! Qu'ils se taisent dorénavant, ces clercs qui
médisent des femmes ! Qu'ils se taisent, tous leurs complices et alliés
qui en disent du mal ou qui en parlent dans leurs écrits ou leurs poèmes
! Qu'ils baissent les yeux de honte d'avoir tant osé mentir dans leurs
livres, quand on voit que la vérité va à l'encontre de ce qu'ils
disent..." p.125
Christine de Pizan. La Cité des Dames. Le livre de poche. 2021
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