lundi 28 juillet 2025

Marylin

"Arbres tristes et doux – je vous souhaite – le repos mais vous devez rester sur vos gardes."

Marylin Monroe – Fragment 1955


À l'occasion de la lecture de "Musée Marylin" de Anne Savelli, je ressors de la bibliothèque "Marylin Monroe – Fragments – Poèmes, écrits intimes, lettres" paru au Seuil en 2010 dans la traduction de Typhaine Samoyault. Je devrais aussi ressortir "Blonde" de Joyce Carol Oates : son roman puissant est une autre manière subtile d’explorer le mystère Norma Jeane Baker. Serait-il judicieux de saisir aussi le volume des "Mythologies" de Roland Barthes ?


La façade pour tous qui nous est souvent présentée, souriante, la plupart du temps sublime et parfois un peu vulgaire, n’a pas réussi à masquer totalement l'être plus complexe qu’il n’y paraît, cet "être humain chaleureux, impulsif, timide et solitaire, sensible et craignant d’être repoussé, et pourtant toujours affamé de vie et de satisfaction." (Lee Strasberg). Cette quête de l’être derrière le mythe anime les livres les plus intéressants sur Marylin, dont celui de Anne Savelli.


Alors, quoi de plus trompeur que les photographies : pourtant, Anne Savelli nous propose un voyage muséal érudit dans le monde des images afin d'aller voir derrière le miroir. Elle nous propose d'entrer dans un musée en compagnie d'un guide, mais en vérité, c'est une invitation à rentrer dans une expérience d'écriture : c'est bien par l'écriture que se fait l'approche de Marylin, ce sont le style et la poésie, les choix narratifs de l'autrice qui tentent de lever le voile en commentant des photographies absentes du livre (un tour de force, écrit Sabine Huynh) pour nous offrir un texte subtil en forme d’approche littéraire et poétique de Marylin Monroe.


On entre donc dans ce musée presque comme Dante accompagné de Virgile à l’entrée de l’Enfer, ("...passé le seuil, vous ne pourrez plus faire demi-tour" nous dit le guide) mais c'est d’un trottoir sans abri du soleil qu’on est parti, pas d’une forêt obscure, et l’éblouissement suivra. 


Mary Jeane Baker, Marylin, tu es regardée sans être vue, on ne devine que la lumière que tu captes, tu deviens cette lumière et tu aveugles les photographes.


Les relations avec les photographes et le public sont ainsi décryptées, de manière plus générale celles avec les hommes, mais aussi la place du mythe dans l'économie hollywoodienne et la société américaine de l'époque. On approche aussi l'intimité de Marylin et s'esquisse ainsi - avec empathie - une psychologie de l'artiste ainsi qu'une analyse de son rapport à son propre corps ; le parcours est chronologique, commencé dans une usine en 1944 pour se terminer dans un palace.


"S’exposer, on le sait, possède deux acceptions : c’est se montrer aux autres, mais aussi se mettre en danger." Sexe posé.


Anne Savelli s’engage dans ce livre, met en jeu son écriture : on ne lit pas une biographie ou un catalogue, mais un parcours d’autrice mettant en œuvre ses talents d’écrivain pour esquisser un portrait allant au-delà des apparences, creusant les mots pour creuser l’être, travaillant la syntaxe et la narration pour écrire la grammaire Marylin.

C'est tellement bien réussi qu’on est en droit de se demander à quoi pourrait ressembler une autre expérience similaire d’écriture de Anne Savelli, à propos de Sylvia Plath par exemple...


Anne Savelli – Musée Marylin – Éditions Inculte 2010


Musée Marylin - Anne Savelli

Marylin Monroe - Fragments








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