Voici
un texte performatif, dont les mots détruisent ce dont ils parlent.
Inventeur du terme "autofiction" après son livre "Fils" 1977,
Doubrovsky, dans ce "Livre brisé" 1989, met lui-même en évidence les
limites du genre qu'il a promu, en décrivant, dans un style situé
quelque part entre Céline et Philip Roth, des événements dont c'est la
narration elle-même qui amènera à leur brisure.
Conversation amoureuse à New-York agrémentée de belles pages sur Sartre,
l'auteur avoue que le romancier, dès qu'il a la plume en main, est
tenté d'être méchant, mais le texte de Doubrovsky a aussi une dimension
auto-destructrice pour son auteur. Il reprend aussi à son compte la
célèbre citation de Proust : "La vraie vie, la vie enfin découverte et
éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c'est la
littérature."
Brisure tragique dans le réel, mais relative dans le champ littéraire :
le livre eut du succès et remporta le prix Médicis en 1989.
Très fort ou insupportable ? Probablement les deux ensemble.
Page 215 : "Si les personnages commencent à protester contre l'auteur, à
se rebeller contre lui, on ne pourra plus écrire."
Serge Doubrovsky. Le livre brisé. Les Cahiers Rouges. Grasset 2012
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