Ce livre de Lucien Febvre, avec ceux de François Bon, Lazare Sainéan, Abel Lefranc, François Rigolot et Michael Screech, prend une place de choix dans mon atelier lecture consacré à Rabelais. Il répond à la question importante de décrire la religion de Rabelais, et il le fait avec nuances.
L’intérêt majeur de ce texte est qu’il décrit de manière précise et détaillée les manières de vivre et surtout de penser de l’époque, avec une forme d’empathie intellectuelle rigoureuse qui pourrait bien être un vrai modèle pour notre époque, à laquelle elle manque.
Dans des pages passionnantes, Febvre décrit la mainmise intégrale de la religion de l’époque sur la vie privée, professionnelle, publique et mentale. Il montre comment la société du XVIᵉ siècle français et européen ne pouvait déployer son outillage mental qu’à l’intérieur d’une religion omniprésente et totalitaire qui réglait tous les évènements de la vie quotidienne et de la vie psychique et intellectuelle.
Febvre décrit les nombreux mots de la philosophie qui manquaient aux penseurs de l’époque, leur syntaxe défaillante, mouvante et imprécise, l’emprise du latin sur les manières de penser, et précise ainsi les limites et le cadre dans lesquels la réflexion pouvait se développer.
L’auteur nous propose donc d’éviter de plaquer nos modes de pensée sur ceux d’une époque révolue afin de mieux comprendre sans anachronisme : il nous donne ainsi une leçon humaniste pour la compréhension de l’autre, de son altérité, de ses manières d’être et de penser.
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