Le
traitement stylistique donné par Appelfeld à la situation de départ -
celle de la maltraitance et du massacre d'une famille juive - ressemble
un peu à une pièce de Samuel Beckett : cela rend encore plus absurdes et
tragiques les comportements des persécuteurs et les idées reçues qui
les sous-tendent.
Le livre traite de l'antisémitisme, mais aussi des violences liées à la
domination masculine.
Lorsque le pire arrive, il est d'abord inconcevable, irreprésentable,
les mots manquent, le déni est le premier mécanisme de défense.
La fuite suit et constitue la deuxième partie du roman. L'héroïne, comme
dans les contes, y trouve des alliés dans cette contrée au sud de
Crzernowitz (Tchernivtsi), non loin du point reliant les frontières de
la Moldavie, de la Roumanie et de l'Ukraine, une région qui a encore le
souvenir de son ancien nom : la Bucovine. Sa fuite est un parcours d'illumination et de prédication, à la
rencontre de l'humanisme de la sororité, à moins qu'il ne soit un chemin
vers la folie, le long d'une rivière qui est aussi une frontière.
Voilà : antisémitisme, violence masculine, c'était en Ukraine dans les
années 30...
Ce livre est le dernier écrit par Appelfeld (1932-2018) : ce dernier est
mon premier lu de cet auteur, il ne sera pas le dernier.
Aharon Appelfeld. La Stupeur. Points Seuil 2023
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