Annie
Ernaux nous surprend encore et frappe fort avec ce court récit d'une
passion amoureuse et sexuelle écrit après deux livres consacrés à son
père et à sa mère.
"Il m'a semblé que l'écriture devait tendre à cela, cette impression que
provoque la scène de l'acte sexuel, cette angoisse et cette stupeur,
une suspension du jugement moral."
Ernaux décrit l'obsession, la focalisation, l'obnubilation sur sa
passion simple (mais est-elle aussi simple que cela ?) et la
concentration du texte (77 pages en Folio) est une forme à l'image du
contenu.
En creux se dessine l'aliénation liée à l'exclusivité de cette passion,
dans laquelle Annie Ernaux indique qu'elle n'est "plus que du temps
passant à travers moi.", une aliénation dans laquelle "s'épuise un
capital de désir", et qui exclut une lecture seulement romantique de son
livre.
De l'aliénation à la réification, il n'y a qu'un pas et Ernaux se
décrivant comme un objet d'amour devient aussi un objet : et ce n'est
pas seulement la séparation qui la fera sortir de l'impasse, mais
l'écriture.
Mais encore une fois, elle décrit une expérience ayant une valeur nous
concernant tous, "l'absolu de la passion et aussi son universalité", une
expérience dans laquelle on mesure le temps autrement. Pas si simple
donc...
Je ne sais pas si cela a été fait, mais il me semble qu'une lecture
comparée entre ce livre et "L'amant" de Marguerite Duras pourrait avoir
un intérêt... À suivre.
Ernaux, Annie - Passion simple 1992 - Folio Gallimard
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire