mardi 16 janvier 2024

Ernaux 1992

Annie Ernaux nous surprend encore et frappe fort avec ce court récit d'une passion amoureuse et sexuelle écrit après deux livres consacrés à son père et à sa mère. "Il m'a semblé que l'écriture devait tendre à cela, cette impression que provoque la scène de l'acte sexuel, cette angoisse et cette stupeur, une suspension du jugement moral." Ernaux décrit l'obsession, la focalisation, l'obnubilation sur sa passion simple (mais est-elle aussi simple que cela ?) et la concentration du texte (77 pages en Folio) est une forme à l'image du contenu. En creux se dessine l'aliénation liée à l'exclusivité de cette passion, dans laquelle Annie Ernaux indique qu'elle n'est "plus que du temps passant à travers moi.", une aliénation dans laquelle "s'épuise un capital de désir", et qui exclut une lecture seulement romantique de son livre. De l'aliénation à la réification, il n'y a qu'un pas et Ernaux se décrivant comme un objet d'amour devient aussi un objet : et ce n'est pas seulement la séparation qui la fera sortir de l'impasse, mais l'écriture. Mais encore une fois, elle décrit une expérience ayant une valeur nous concernant tous, "l'absolu de la passion et aussi son universalité", une expérience dans laquelle on mesure le temps autrement. Pas si simple donc... Je ne sais pas si cela a été fait, mais il me semble qu'une lecture comparée entre ce livre et "L'amant" de Marguerite Duras pourrait avoir un intérêt... À suivre.
 
 
Ernaux, Annie - Passion simple 1992 - Folio Gallimard
 

 

 

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