Dans
ce livre datant de 1973, le propos de Monique Wittig semble se
radicaliser.
Après la mise en avant du pronom "on" dans "L'opoponax" 1964 et celle du
pronom "elles" dans "Les guérillères" 1969, voici l'avènement du "je"
dans "Le corps lesbien" 1973.
Ou plus précisément du "j/e", et de la forme pronominale "m/e", Wittig
indiquant qu'elle ne fait qu'entrer par effraction dans un langage qui
lui est étranger, car dominé par l'universalité du "il".
Wittig continue donc de creuser la langue française, mais au-delà de ses
recherches formelles, ce qui frappe une fois de plus, c'est la grande
beauté de ce texte, sa puissance poétique et brûlante placée sous le
signe de Sappho.
Elle met cette fois en scène un corps morcelé, déchiqueté, comme
autopsié, mais c'est bien le langage qui est ici décortiqué, démonté
pour mettre en évidence les rapports de domination.
On a donc un texte multidimensionnel, poétique, politique, de recherche
formelle, mais qu'on ne peut réduire à l'une ou l'autre dimension.
Autrement dit, classer ce livre dans une rubrique unique (poésie, ou
féminisme, ou lesbianisme, ou politique), cela serait le réduire et
passer à côté.
On le rangera donc sur l'étagère Monique Wittig et cela sera déjà
fabuleux.
Monique Wittig. Le corps lesbien. Éditions de Minuit.
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